Face à un phénomène alarmant de violences envers les professionnels de santé, et notamment les infirmières libérales, le Parlement a adopté une loi historique le 25 juin 2025, promulguée le 9 juillet, qui vise à renforcer leur protection juridique et à faciliter les démarches des victimes.
Une réponse à une situation de plus en plus critique
Depuis plusieurs années, les données de l’Observatoire National des Violences en milieu de Santé (ONVS) rapportent près de 20 000 signalements par an, représentant environ 30 000 atteintes aux personnes et 5 000 atteintes aux biens.
Chez les infirmières libérales, le constat est encore plus préoccupant. Selon une enquête menée en mars 2025 par l’Ordre national des infirmiers, sur plus de 31 000 répondants :
- 66 % ont déjà été victimes de violences dans leur exercice,
- 73 % en ont été témoins,
- 40 % des infirmières subissent des violences plusieurs fois par an, et 15 % presque chaque semaine.
Les formes de violences sont multiples : insultes (75 %), menaces physiques (45 %), coups (37 %), menaces de mort (16 %), et même dégradations de biens personnels (10 %).
👉🏻 Résultat : 54 % des infirmières ne se sentent pas en sécurité au travail, et 26 % envisagent de quitter la profession dans l’année.
💡Pour en savoir plus : Communiqué de presse : L’Ordre National des Infirmiers porte la voix de la profession sur les violences subies par les professionnels
Les apports clés de la loi de juin 2025 pour faire face aux violences infirmières
Une protection pénale élargie pour les infirmières face aux violences
La loi étend désormais la protection juridique à tous les professionnels intervenant dans les lieux de soins, y compris les infirmières libérales à domicile, les pharmaciens, agents administratifs, ou encore secrétaires médicales.
Violences infirmières : des peines renforcées selon la gravité des faits
- Violences physiques avec ITT > 8 jours : jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 € d’amende.
- Violences ayant causé mutilation ou décès : jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle.
- Agressions sexuelles : jusqu’à 7 ans de prison, 100 000 € d’amende.
- Vols ciblés de matériel ou d’ordonnances : peines alourdies.
Extension du délit d’outrage
Les insultes et menaces contre des professionnels de santé libéraux sont désormais punies d’une amende de 7 500 €.
En cas d’outrage à domicile ou en cabinet, s’ajoute une peine de 6 mois d’emprisonnement.
Violences infirmières : une procédure de dépôt de plainte facilitée
Désormais, le dépôt de plainte pour les infirmières victimes de violences est facilité. Un employeur peut engager une procédure en leur nom, à condition d’avoir obtenu leur accord écrit. Du côté des professionnels libéraux, ce sont les URPS ou les Ordres professionnels qui pourront se charger de porter plainte à leur place, sur simple demande. Par ailleurs, il sera possible d’indiquer l’adresse professionnelle comme adresse personnelle dans la plainte, afin de protéger la vie privée des victimes. Enfin, un dispositif de visio-plainte, déjà expérimenté pour les victimes de violences sexuelles, sera généralisé d’ici fin 2025 pour permettre aux soignants de porter plainte à distance.
Une mesure forte, mais à accompagner dans la durée
Cette loi s’inscrit dans le cadre du plan national pour la sécurité des professionnels de santé, lancé en septembre 2023, structuré autour de 3 axes :
- Sensibiliser le public et former les soignants,
- Prévenir les violences et sécuriser l’exercice,
- Déclarer les violences et accompagner les victimes.
Elle constitue une avancée majeure, mais son efficacité reposera sur sa mise en œuvre concrète, la mobilisation des structures locales, et le soutien continu aux soignants sur le terrain.