Faire face aux violences conjugales et/ou familiales en tant qu'infirmière libérale

Violence conjugale / familiale : comment gérer la situation en tant qu'IDEL ?

Les violences conjugales et familiales représentent un enjeu majeur de santé publique. En tant qu'infirmière libérale, vous êtes souvent en première ligne pour les détecter et intervenir auprès des victimes. ? Dans cet article, La Ruche vous partage des outils et des conseils pour repérer les signes de violences, apporter un soutien adéquat et orienter vos patients victimes de violences conjugales et/ou familiales vers les structures appropriées.

Comprendre les violences conjugales et familiales

Les violences conjugales et familiales constituent un phénomène complexe et multifacette qui touche toutes les couches de la société. En tant qu'infirmière libérale, il est important de comprendre les différentes formes que peuvent prendre ces violences, ainsi que leurs conséquences sur les victimes et les signes permettant de les identifier.

Les différentes formes de violences

Les violences au sein du couple et de la famille ne se limitent pas aux agressions physiques. Elles peuvent être :

  • ➡️ Physiques : coups, gifles, brûlures, séquestration, etc.
  • ➡️ Psychologiques : humiliations, dévalorisation, isolement, menaces, etc.
  • ➡️ Verbales : insultes, critiques systématiques, menaces verbales
  • ➡️ Économiques : contrôle des finances, privation de moyens financiers, interdiction de travailler.
  • ➡️ Sexuelles : viol, contraintes à des actes sexuels non désirés, mutilations génitales.
  • ➡️ Administratives : retenue des papiers d'identité, contrôle des documents personnels.
  • ➡️ Sociales : isolement social, interdiction de voir la famille ou les amis, surveillance des communications.

Ces violences peuvent se cumuler et s’intensifier avec le temps, créant un climat de peur et de tension permanent.

Les conséquences des violences sur les victimes

Les violences conjugales ont de graves conséquences durables sur la santé physique et psychologique des victimes. Elles peuvent entraîner des :

  • conséquences physiques : blessures, fractures, contusions, douleurs chroniques, troubles gynécologiques, maladies psychosomatiques ;
  • conséquences psychologiques : dépression, anxiété, stress post-traumatique, troubles du sommeil, perte de l’estime de soi, idées suicidaires ;
  • conséquences sociales et économiques : isolement social, perte de l'emploi, précarité financière ;
  • conséquences sur la parentalité : difficultés à assumer le rôle parental, transmission des comportements violents aux enfants, exposition des enfants à un climat de violence.

Quelques chiffres sur des violences conjugales en France

Les données épidémiologiques montrent l'ampleur du phénomène :

  • 💡 En France, 219 000 femmes âgées de 18 à 75 ans sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles chaque année de la part de leur conjoint ou ex-conjoint.
  • 💡 Seules 19 % des femmes victimes de violences déclarent avoir déposé plainte.
  • 💡 En 2023, 94 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire.
  • 💡 Les enfants sont également affectés : en 2023, 62 enfants ont été tués par un de leurs parents dans un contexte de violences conjugales. Tous les cinq jours en France, un enfant meurt sous les coups de l'un de ses parents.

Les obstacles à la révélation des violences conjugales

Les victimes de violences conjugales peuvent hésiter à révéler leur situation pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, la peur des représailles est un facteur majeur : les victimes craignent la réaction violente de leur agresseur si elles dévoilent les abus.

Ensuite, la honte et la culpabilité jouent un rôle important. Les victimes se sentent souvent responsables des violences qu'elles subissent, ce qui les empêche de parler.

Le manque de confiance est également un obstacle : elles redoutent de ne pas être crues ou soutenues par leur entourage ou les professionnels de santé. La dépendance financière ou affective rend difficile l'idée de quitter le partenaire violent, surtout si elles sont économiquement dépendantes ou émotionnellement attachées à lui.

Enfin, l'isolation sociale constitue une barrière importante. Sans soutien familial ou amical, les victimes se sentent seules et sans ressources, ce qui les décourage de chercher de l'aide.

Votre rôle face aux violences conjugales et familiales en tant qu'IDEL

Votre proximité avec les patients à domicile vous place dans une position privilégiée pour repérer les signes de violences et intervenir discrètement. La HAS recommande de questionner systématiquement les patientes sur leur sécurité à domicile, même en l'absence de signes évidents de violence.

Les signaux pouvant vous alerter sur les violences conjugales

  • Blessures fréquentes ;
  • Attitude introvertie (annulation répétée de rendez-vous, conjoint omniprésent) ;
  • Expression de peur et/ou d’insécurité ;
  • Perte de l’estime de soi, honte, culpabilité ;
  • Déni ;
  • Idées suicidaires.

Si vous repérez ces signes, voici quelques questions que vous pouvez poser à vos patients pour tenter d'y voir plus clair et intervenir en cas de besoin :

  • 👉 "Comment vous sentez-vous à la maison ?"
  • 👉 "En cas de dispute, cela se passe comment ?"
  • 👉 "Vous est-il déjà arrivé d'avoir peur de votre partenaire ?"

Apporter un soutien adapté

Lorsque vous suspectez ou confirmez une situation de violence, il est crucial d'adopter une attitude empathique et sans jugement. La victime doit se sentir écoutée et soutenue. Voici la conduite à tenir :

  • Rester à l’écoute et croire la victime ;
  • Rassurer la victime en lui expliquant qu’elle n’est pas responsable ;
  • Éviter les jugements et rester neutre ;
  • Ne pas évoquer le sujet en présence de l’agresseur ou d’une tierce personne.

Orienter les victimes vers les structures appropriées

Votre rôle inclut aussi l’orientation des victimes vers les structures capables de leur offrir une aide juridique, psychologique et sociale. Il est essentiel d’avoir une connaissance des ressources disponibles dans votre région.

  • 1️⃣ Dans un premier temps, vous devez informer la victime de ses droits et des possibilités de porter plainte
  • 2️⃣ Ensuite, orienter la vers des associations spécialisées dans l'aide aux victimes
  • 3️⃣ Si besoin est, vous pouvez établir un plan d’urgence avec la victime en cas de danger imminent
  • 4️⃣ Si nécessaire, vous pouvez également remplir une attestation clinique infirmière pour la victime

Violences faites aux femmes

Le numéro de téléphone 3919 est un service dédié à l'écoute, l'information et l'orientation des femmes victimes de violences ainsi que des témoins de ces violences. Ce service est conçu pour fournir une assistance initiale et une orientation vers des ressources appropriées.

Le 3919 traite divers types de violences, y compris les violences physiques, verbales ou psychologiques. Ces violences peuvent se produire à la maison ou au travail et incluent le harcèlement sexuel, les coups et blessures, ainsi que les viols.

Cependant, ce service n'est pas destiné à gérer les situations d'urgence. En cas d'urgence imminente, appelez directement le 17 !

Le rôle principal du 3919 est d'assurer une réponse de premier niveau et d'orienter ou transférer les appels vers les numéros utiles selon les besoins spécifiques des appelants. Les appels peuvent être effectués gratuitement depuis un téléphone fixe ou mobile en métropole et dans les DOM, incluant la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion.

Ce service est disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, garantissant ainsi un soutien continu. De plus, les appels sont anonymes et ne figurent pas sur les factures de téléphone, assurant ainsi la confidentialité des personnes contactant le 3919.

Travailler en réseau

Les situations de violences conjugales nécessitent une prise en charge pluriprofessionnelle. Travailler en réseau avec d'autres professionnels de santé, travailleurs sociaux et structures d'aide est fondamental pour assurer une prise en charge des victimes de ces violences.

En tant qu'IDEL, vous pouvez faire appels à différentes personnes telles que des médecins généralistes, psychologues, travailleurs sociaux, associations locales de soutien aux victimes ou encore services de police et justice.

Votre rôle d'IDEL est important aux yeux des victimes de violences conjugales et/ou familiale. Votre vigilance, votre écoute et votre capacité à orienter les victimes peuvent faire une différence significative dans la vie des personnes concernées. N’hésitez pas à vous former continuellement et à vous appuyer sur les recommandations et les outils mis à votre disposition par la HAS et d’autres organismes.

Vous êtes-vous déjà retrouvé face à ce genre de situation ? N'hésitez pas à partager vos ressentis avec nous !

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