Être IDEL en Bretagne : le témoignage de Gwenn

devenir IDEL en Bretagne

Ah, la Bretagne ! Ses côtes sauvages, ses plages de sable fin, ses villages pittoresques et ses forêts mystérieuses... Mais la Bretagne, c’est aussi un territoire riche en opportunités pour les professionnels de santé. Derrière chaque cri de mouette et chaque galet poli par les vagues, se cache une communauté en quête de soins de proximité. ⛵vPour toutes celles qui envisagent de se lancer dans l’aventure en tant qu’infirmière libérale en Bretagne, nous avons rencontré Gwenn, IDEL depuis 10 ans dans la région. Elle partage avec nous son expérience, ses conseils, et les spécificités de l’exercice en Bretagne.🌈

Le témoignage de Gwenn : IDEL en Bretagne

Bonjour Gwenn, peux-tu nous raconter ton parcours et ce qui t'a conduit à devenir IDEL en Bretagne ?

Gwenn : J’ai un parcours assez atypique. J’ai commencé par des études d’aide-soignante, puis repris mes études d’infirmière, financées par l’hôpital. Originaire de Bretagne, je suis partie à Paris pour me former et y ai vécu 12 ans. Ensuite, j’ai travaillé à l’étranger, notamment au Venezuela, en Martinique et en Suisse. À mon retour, ne sachant pas où m’installer, je suis revenue en Bretagne et me suis établie à Rennes.

J’ai exercé principalement en réanimation, au SAMU, aux urgences et en oncologie dans un centre où je suis restée 9 ans. J’adorais mon travail à l’hôpital, mais à la quarantaine, j’ai commencé à douter. Le management hospitalier avait évolué : il était moins centré sur le patient et davantage sur la gestion des coûts. Ce changement m’a poussée à réfléchir à une autre voie.

Je ne pensais jamais me lancer dans le libéral, mais j’ai finalement créé mon propre cabinet, de manière plutôt atypique : sans expérience préalable dans le libéral et sans même une journée de doublon avec une autre, idel pour me préparer.

Guide pour devenir infirmière libérale

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Quelles sont les particularités de l'exercice en Bretagne ?

Gwenn : Les particularités de l’exercice idel en Bretagne se remarquent surtout en haute saison. Sur la côte, par exemple, l’activité augmente significativement pendant 4 à 5 mois de l’année, car la population quadruple avec l’arrivée des vacanciers, souvent propriétaires de résidences secondaires nécessitant parfois des soins. Cela impose un rythme particulier, où les périodes estivales ne ressemblent pas à des "congés".

À l’inverse, en ville, comme à Rennes, mes collègues idel font face à d’autres défis : stationnement compliqué, circulation dense, manifestations, et parfois des zones moins sûres. Ces contraintes influencent l’organisation des tournées, très différente de celle des zones rurales, où ces problèmes sont inexistants.

En Bretagne, nous avons aussi la chance d’un climat tempéré, avec peu d’intempéries majeures comme des inondations ou tempête de neige qui compliquent l’exercice infirmier dans d’autres régions. Les tempêtes bretonnes, bien que présentes, restent gérables. Finalement, chaque environnement – ville, campagne, ou région touristique – nécessite une adaptation spécifique pour gérer son cabinet et son activité au mieux.

Quelles sont les premières étapes et les premiers conseils pour quelqu'un qui souhaite s'installer en tant qu'IDEL en Bretagne ?

Gwenn : Installer son cabinet libéral peut être rapide : une fois la pancarte mise, le planning se remplit sans difficulté. Mais cela dépend aussi des zones. Par exemple, certaines régions comme le centre Bretagne, traversées par des lignes de zonage, peuvent être moins attractives. Chaque installation reste un choix très personnel.

De mon côté, mon parcours est atypique : je me suis installée sans avoir jamais exercé en libéral auparavant, ce qui est assez rare. Je suis toujours impressionnée par les infirmiers ou infirmières qui s’installent avec seulement trois ans d’expérience. Cela demande beaucoup de courage et une capacité à tout gérer seul. Personnellement, j’ai attendu d’avoir accumulé suffisamment d’expérience avant de me lancer, car la transition entre le travail d’équipe à l’hôpital et le travail en solo est un vrai défi. Il faut savoir gérer les imprévus, les urgences, et l’absence d’un collègue ou d’un médecin à proximité immédiate.

C’est pourquoi beaucoup de professionnels, avant de s’installer, choisissent de faire quelques tournées avec un cabinet déjà en place, pour tester ce mode d’exercice. Les cabinets libéraux sont très variés : certains font du nursing, d’autres non, certains prennent en charge les enfants, d’autres pas.

Pour ma part, mon cabinet accueille une patientèle plus jeune que la moyenne nationale. Cela s’explique par notre localisation en périphérie de Rennes, dans une zone où les terrains sont plus accessibles. Nous avons beaucoup de primo-accédants, souvent de jeunes familles ou des couples qui prévoient d’avoir des enfants, ce qui influence naturellement le profil des patients.

Quels sont les avantages et les défis de ce choix de carrière ?

Gwenn : On a un peu parlé juste avant car si tu peux avoir l'avantage de la liberté, oui oui, mais encore faut il savoir l'appréhender quand il faut se sentir prêt. On voit quand même de plus en plus de gens qui sont partis. Il y a eu un espèce d'eldorado du libéral il y a cinq six ans et et on voit des gens qui tu le vois passer sur les trois ans vachement, qui font un dans un an, deux ans, trois ans et qui retournent en structure.

On voit aussi des gens qui ont fait 20 ans de libéral et qui retournent en structure. Ça l'est beaucoup moins avec leur nouveau algorithme à la con. En fait, tu prends en charge des patients, vas, goûtant pour pas grand chose. Moi je ne me plains pas, mais je vois bien en fait où ils veulent en venir.

Et surtout, il y a les charges qui sont énormes et qui augmentent. Et ça, quand quelqu'un a été salarié pendant fort longtemps, l'entrepreneuriat, quel qu'il soit, engendre ça.

Donc je pense que les enjeux là dessus, sur les points positifs, c'est ça, c'est de pouvoir avoir une certaine liberté, à condition que tu arrives à la prendre à bras le corps et en profiter, tout en sachant que, comme dans tout travail, il y a quand même aussi des inconvénients et qu'il faut les accepter. Après c'est à savoir si la personne, elle est en capacité d'accepter ce type d'inconvénients.

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Comment gères tu lorsqu'un patient est violent ?

Gwenn : En tant qu’infirmière, tu as l’obligation de continuité des soins, ce qui signifie que tu ne peux pas arrêter une prise en charge, même si ta sécurité est en jeu. Bien sûr, il est possible de déposer une main courante ou de faire appel au juge, mais cela n'annule pas cette obligation. C'est un aspect dont on parle peu, mais qui peut te mettre dans des situations très compliquées, notamment face à des comportements agressifs répétés.

Le problème, c'est que ces patients sont souvent déjà connus des cabinets, et personne ne veut reprendre leur prise en charge. Dans ce cas, la seule solution pour arrêter les soins est de trouver un autre professionnel ou cabinet prêt à assurer la continuité derrière toi. Ce n’est pas toujours évident, mais c’est une contrainte qu’on ne peut pas ignorer.

As-tu des petits conseils pour bien gérer son activité d'IDEL ?

Gwenn : Dans notre organisation, nous utilisons WhatsApp pour échanger les informations nécessaires au bon fonctionnement du cabinet. On a un groupe général dédié à l’équipe complète, mais comme on est souvent deux à travailler par jour, on crée des conversations plus restreintes pour ne pas déranger les autres collègues. On privilégie aussi les messages vocaux : chacune peut les écouter tranquillement, quand elle est disponible, sans se sentir pressée.

Pour les transmissions, on passe par mail, ce qui permet à chacune de les consulter à son rythme et de garder une trace écrite. C’est pratique, surtout si on a besoin de se rappeler certains détails le lendemain. Avec les médecins, on fonctionne principalement par SMS. Grâce à une relation de confiance, on a leurs numéros personnels, et ils répondent rapidement si on les appelle (ce qui est rare). Sinon, on leur envoie un message, qu’ils traitent entre deux consultations.

Récemment, nous avons intégré une maison de santé toute neuve, ce qui renforce encore plus la coordination entre professionnels. Nous allons également partager un logiciel commun pour structurer davantage notre travail et optimiser les échanges.

Pour moi, la clé en libéral, c’est de recréer une dynamique d’équipe, même si on ne travaille pas toujours au même endroit. Une sorte d’équipe "virtuelle", avec des moments d’interactions physiques ou à distance, pour assurer une prise en charge coordonnée et optimale des patients.

Pour toi, être IDEL en zone semi-rurale, c'est aussi créer du lien avec d'autres professionnels de santé ?

Gwenn : Pour créer du lien et renforcer les relations avec les autres professionnels de santé, il faut être un peu porteur de projet et proactif dans les rencontres. De notre côté, on a commencé par les inviter au restaurant, une fois par trimestre, pour partager un moment convivial et initier ces échanges. Petit à petit, ça a évolué. Maintenant, on organise parfois encore des restos, mais souvent, chacun apporte sa gamelle, et on se retrouve pour déjeuner ensemble. Même si on n’est pas au même endroit géographiquement, on arrive à se réunir, notamment chez les médecins, dans une salle suffisamment grande, pour discuter et partager un repas.

Si je devais donner un conseil à une IDEL, ce serait vraiment de construire ces relations localement, au-delà d’un simple réseau professionnel. Il s’agit de recréer une dynamique d’équipe avec les acteurs du secteur, un peu comme dans un cadre hospitalier.

On organise aussi des moments conviviaux comme la galette des rois, un repas de Noël, ou encore un barbecue en juin avant les vacances. Être proactif sur ce genre d’initiatives donne envie aux autres de continuer à collaborer et à échanger avec nous. Cela favorise un véritable esprit d’équipe et une meilleure coordination au quotidien.

L'environnement hospitalié te manque-t-il ?

Gwenn : Quand j'ai quitté l'hôpital, ça m'a pris trois ans pour vraiment m'en remettre. Pendant tout ce temps, je me suis souvent dit que j'avais peut-être fait une erreur, parce que la vie hospitalière, avec son effervescence et l'esprit d'équipe, me manquait énormément. J'aimais mon travail en libéral, mais ce manque d'équipe était difficile à gérer, au point où je me suis demandé plusieurs fois si je ne devais pas retourner à l'hôpital.

Finalement, la solution n'était pas de repartir, mais de recréer cet esprit d'équipe dans mon activité libérale. Petit à petit, on a réussi à construire quelque chose, et aujourd'hui, avec l’arrivée de jeunes médecins qui partagent parfois cette même appréhension de la solitude professionnelle, on a instauré un vrai lien.

Certains moments émotionnellement compliqués, que ce soit des prises en charge difficiles ou des décisions à prendre, sont plus faciles à gérer grâce à nos échanges. Maintenant, on organise des RCP (réunions de concertation pluridisciplinaires) sur certains patients, on partage nos expériences, et ça nous permet d'avancer ensemble. Ce soutien mutuel a changé beaucoup de choses et nous rassure tous.

Aurais-tu une petite anecdote à nous partager ?

Gwenn : Cela tombe bien parce que tu vois, on arrive à Noël et je vais t'expliquer mon anecdote durant cette période. C'était le 25 décembre, ma tournée commençait tôt, et je suis arrivée chez mon premier patient vers 6 h 30. En entrant, il m’a dit avec un grand sourire : "Gwenn, j’ai un cadeau pour toi, il est sur la table."

Je m’attendais à des chocolats – classique pour les fêtes – mais là, surprise totale : il n’y avait qu’une seule chose sur la table... un faisan ! Oui, un faisan, prêt à cuisiner. Heureusement, il avait pris soin de le plumer. Mais imaginez-moi, à l’aube, en pleine tournée, avec un faisan sous le bras ! J’étais tellement déconcertée que j’en ai ri toute la matinée.

C’est devenu une des meilleures anecdotes que je partage quand on me demande quels cadeaux inattendus on peut recevoir en libéral. Ce patient pensait vraiment me faire plaisir, et il avait raison : grâce à lui, j’ai pu partager ce drôle de cadeau avec ma famille. Un souvenir mémorable de mes débuts !

Un dernier mot pour les bretonnes qui hésitent à s'installer en tant qu'infirmière libérale ?

Gwenn : DEGEMER MAT (bienvenue en breton) à toutes les nouvelles idel ! La population bretonne est vraiment accueillante et chaleureuse. C'est une région où les gens sont très sympathiques. J’aurais également un avis similaire sur le Pays Basque, que je connais bien. Là-bas aussi, les gens sont adorables, toujours prêts à ouvrir leur porte et à partager leur intimité. C’est une population facile d’accès, vraiment accueillante.

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