Infirmières : des pratiques en redéfinition, un métier en pleine mutation. En juin 2025, le Conseil international des infirmières (CII) a publié deux nouvelles définitions officielles : celle de l’infirmière et celle des soins infirmiers. Cet effort de redéfinition, conduit à l’échelle mondiale, arrive à un moment crucial pour les systèmes de santé, secoués par le vieillissement démographique, la pénurie de soignants, la montée des maladies chroniques et les bouleversements technologiques. Pour les infirmières libérales, en première ligne au quotidien, cette redéfinition marque une étape importante. Elle vient légitimer des compétences déjà largement mobilisées sur le terrain : autonomie clinique, coordination, éducation, prévention. Mais suffira-t-elle à faire évoluer les textes français ? Va-t-elle réellement transformer les représentations du métier ? Et comment les IDEL peuvent-elles s’en saisir pour faire reconnaître leur rôle ? Décryptage d’un nouveau cadre international qui ambitionne de repositionner les infirmières au cœur des parcours de soins.
Compétences cliniques, éthique, leadership : vers une reconnaissance élargie du métier infirmier ?
Dans les textes publiés, le CII insiste sur le fait que les soins infirmiers ne se résument pas à une série d’actes techniques. Ils s’appuient sur une approche globale de la santé, intégrant la prévention, l’éducation thérapeutique, l’accompagnement en fin de vie, la promotion de la dignité et la justice sociale.
Quant à l’infirmière, elle est désormais présentée comme une professionnelle formée scientifiquement, compétente cliniquement, et dotée de responsabilités multiples : pédagogie, coordination, recherche, leadership. Elle agit avec discernement, éthique et sens du collectif.
Une redéfinition qui consacre officiellement le rôle transversal et décisif que joue l’infirmière dans les parcours de santé. Pour beaucoup, c’est la reconnaissance attendue d’un métier en mutation, reflet de pratiques en redéfinition sur le terrain.
Une ambition mondiale pour accompagner les pratiques infirmières en mutation
Le CII, qui représente plus de 29 millions d’infirmières dans le monde, rappelle que cette redéfinition s’inscrit dans une perspective de cohérence mondiale. Selon l’organisation, disposer de définitions communes permettrait de mieux structurer les formations, les référentiels de compétences, les cadres réglementaires et les pratiques professionnelles à l’échelle internationale.
L’objectif affiché est également d’accroître la reconnaissance du rôle infirmier dans les systèmes de santé, notamment en lien avec les enjeux contemporains tels que la sécurité des soins, la prévention, l’équité d’accès ou encore l’impact des inégalités sociales sur la santé.
Les nouvelles pratiques infirmières seront-elles enfin reconnues et encadrées en France ?
D’après l’Ordre national des infirmiers, 565 553 infirmiers étaient inscrits au tableau en mars 2025, dont près de 110 000 en exercice libéral. Ces professionnels assurent une part importante de la continuité des soins, en particulier à domicile. Pourtant, plusieurs études, dont celle menée par la DREES en 2024, signalent une augmentation significative de la charge de travail ressentie, sans toujours trouver de traduction dans les conditions d’exercice ou de reconnaissance.
Dans ce contexte, les infirmières françaises se trouvent au croisement de pratiques en redéfinition, souvent sans accompagnement clair de la réglementation actuelle. Certains acteurs du secteur voient dans cette initiative du CII un outil pour clarifier les rôles, mieux structurer les parcours de formation et ajuster le cadre législatif.
Entre ambitions internationales et réalités nationales : la France est-elle prête à faire évoluer le métier infirmier ?
Le CII insiste sur l’importance de l’appropriation de ces définitions par les États, les institutions, les établissements et les professionnels eux-mêmes. L’enjeu, selon le rapport, est de faciliter l’intégration de ces notions dans les normes de pratique, les programmes de formation, la planification des effectifs et les dispositifs de régulation.
En France, le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), présent lors de la publication du rapport, a salué une redéfinition « fidèle à la réalité du terrain », soulignant la diversité des missions assumées par les infirmiers et infirmières, notamment dans le cadre de la coordination des soins, de l’éducation thérapeutique ou de la gestion d’équipe.
Il reste à voir si et comment ces nouvelles définitions seront reprises dans les textes nationaux. Le référentiel de formation des infirmiers est en cours de révision depuis 2023, et le décret d’actes, régulièrement critiqué pour son manque d’actualisation, fait l’objet de discussions au sein des organisations professionnelles.
Conclusion : une redéfinition à s’approprier pour transformer la réalité
La redéfinition infirmière 2025 proposée par le CII fournit un cadre global actualisé, pensé pour mieux refléter la complexité et l’évolution du métier. Elle pose des bases claires sur le champ d’action de l’infirmière et sur les valeurs qui fondent son engagement.
Sa portée reste, pour l’instant, essentiellement conceptuelle. Mais elle pourrait, à terme, contribuer à alimenter les réflexions sur l’organisation des soins, la répartition des compétences et les modalités d’exercice, en particulier pour les infirmières libérales. Ces dernières incarnent au quotidien des pratiques en redéfinition, entre autonomie grandissante et attentes institutionnelles.
Reste à observer comment les institutions françaises s’en saisiront, et dans quelle mesure cette initiative internationale pourra faire évoluer les représentations, les pratiques et les politiques en santé.
🔗 Lire le rapport sur la révision des définitions d'« infirmière » et de « soins infirmiers ».
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